dimanche 14 mars 2010

Affaire M’ghirbi: Les limites du franc-parler à Dimanche Sport

La grande majorité des téléspectateurs tunisiens a été très déçue de découvrir, dimanche dernier, que le terne Abdelmajid Gobantini avait pris la place réservée d’habitude à leur coqueluche Ahmed M’ghirbi sur le plateau de l’émission «Dimanche Sport».

En effet, malgré toute sa bonne volonté et sa compétence, l’ex-avant-centre de l’Espérance de Tunis ne peut, aux yeux des téléspectateurs, remplacer celui qui a fini, grâce à son franc-parler, son langage simple et populaire, son humour particulier, mais aussi à ses analyses, souvent pertinentes et parfois farfelues, à insuffler un sang neuf à une émission en mal de changement et qui commençait à s’essouffler depuis quelque temps déjà. Qu’a donc fait ou plutôt dit la vedette du dimanche soir pour se retrouver sur la touche?

En fait, après le nul concédé par l’Etoile du Sahel face à l’équipe de Zarzis à Sousse même, lors de la seizième journée du championnat, M’ghirbi déclara que l’entraîneur hollandais fraîchement recruté par le nouveau président de l’ESS faisait fausse route et que sa méthode de jeu était vouée à l’échec, estimant par là-même que son recrutement a été une erreur.

Cet avis technique provoqua un véritable tollé chez les dirigeants de l’Etoile, qui y virent une ingérence intolérable dans leurs affaires internes, comme le déclara leur porte-parole au micro de « Dimanche Sport ». Piqué au vif et fidèle à son style, M’ghirbi répliqua avec beaucoup de véhémence à ces propos, feignant au passage, et à plusieurs reprises, d’oublier le nom du président du club sahélien.

Visiblement très gêné par l’intervention de son analyste favori et coqueluche des téléspectateurs, l’animateur qui trône sur l’émission depuis plus d’une dizaine d’années devint blême et se mit à bafouiller. Il reprit ses esprits, après un court intermède publicitaire, pour rappeler aux téléspectateurs le parcours glorieux de Monsieur Hamed Kammoun, président de l’Etoile du Sahel, présentant par la même occasion ses plus plates excuses au dit président et à « toute la famille étoiliste ».

Mais les choses ne s’arrêtèrent pas à ce stade. En effet, les excuses de l’animateur ne furent pas suffisantes pour calmer le courroux du premier dirigeant de l’Etoile qui, selon certaines indiscrétions, aurait fait appel aux «hautes sphères» du gouvernement pour avoir la tête de l’ex-libéro de charme et international stadiste.

Pourquoi cet acharnement contre une personne qui, au bout du compte, n’a fait que donner un avis technique et jouer le rôle qui est le sien en tant que commentateur sportif?

En réalité, ce qui s’est produit sur le plateau et dans les coulisses de l’émission la plus suivie par les Tunisiens reflète le refus de nos responsables, dans quelque domaine qu’ils soient, de toute critique, aussi positive et constructive soit-elle. Il révèle également que l’ingérence des pouvoirs publics et la censure ne sont pas propres à la politique, mais qu’elles touchent également le domaine du sport et du divertissement, quitte à saborder une émission et à mécontenter ses nombreux téléspectateurs.

Kacem Erraïes

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