samedi 27 mars 2010

L’imprévisibilité: une inquiétude, un réel handicap


Le Conseil Central du Mouvement Ettajdid a lancé un Appel pour un débat national autour de l’avenir de la Tunisie en cette période d’incertitude, notamment quant à l’alternance à la tête de l’Etat.

Cet appel a reçu un grand écho chez de très nombreuses personnes et diverses composantes sociales et politiques. La raison est qu’il soulève une question taboue, mais qui taraude les esprits de toutes les Tunisiennes et de tous les Tunisiens quelles que soient leur catégorie sociale et leurs convictions philosophiques: celle de l’imprévisibilité de l’avenir du pays, qui suscite des angoisses sur sa stabilité politique et sa capacité à poursuivre et approfondir son développement global. Elle suscite chez les investisseurs réels et potentiels, nationaux et internationaux, une tendance à l’attentisme et cela est préoccupant à plus d’un titre. En effet, la période dans laquelle se trouve notre pays est une période de croissance ralentie, de montée du chômage, en particulier chez les diplômés de l’enseignement supérieur, phénomène dont on voit bien l’amplification, mais dont on ne perçoit aucun signe de recul à court et moyen termes. L’investissement est l’élément déterminant de la croissance et de la création d’emplois; son ralentissement déjà marqué depuis de nombreuses années - et que ne doivent pas cacher les investissements étrangers très fortement capitalistiques et très faiblement créateurs d’emplois dans les hydrocarbures en raison de la flambée des cours internationaux -, est exposé à un repli encore plus prononcé. Etant un «pari sur l’avenir», l’investissement est l’expression de l’ «état de confiance» des entrepreneurs. Si l’avenir est «anormalement» imprévisible, la tendance est au refus de s’engager dans un pari trop risqué. L’incertitude est la mère de l’immobilisme. C’est là l’un des problèmes les plus graves aujourd’hui posés.

En réalité, ce n’est pas seulement d’imprévisibilité qu’il s’agit ; ce qui se répand, c’est des scénarios fondés en partie sur l’imagination, en partie sur l’observation des faits, faisant état d’une prise de possession des sommets de l’Etat par «des milieux influents situés en dehors des institutions de la République». Des rumeurs, certes, mais qui se répandent, en particulier dans les milieux d’affaires et qui, à tort ou raison, minent leur moral. Et, ce qui est grave pour la communauté, leur désir d’investissement.

Cette toile de fond fera son œuvre crescendo; elle sera de plus en plus dommageable. C’est pourquoi il urge, non seulement, que notre pays débatte librement de son avenir et élabore les règles de son indispensable transition démocratique, mais que le spectre d’une succession par ces fameux milieux influents soit officiellement et très clairement éloigné, rejeté.

Nous avons tous besoin d’être tranquillisés. De notre tranquillité collective aujourd’hui, dépend notre futur sur tous les plans: politique, certes, mais aussi économique et social.

Mahmoud Ben Romdhane


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