vendredi 30 octobre 2009

Porter l’espoir…

Ce fut une campagne courte, parce que tronquée. Ce fut une bataille dure, très dure. Eprouvante pour les nerfs et, parfois, pour le moral… Une guerre des listes, des affiches, des textes, des allocutions télévisées… Un code électoral déjà en soi peu libéral et souvent interprété dans un sens restrictif par l’Administration. Bref, la marge d’action était réduite, bien plus étroite qu’il y a cinq ans !

Cependant, malgré le doute qui nous a parfois assaillis, malgré le sentiment de faiblesse éprouvé face à cette formidable machine toute destinée à nous acculer dans le coin du ring, malgré les 1,57% de voix attribués à l’opposition aux présidentielles et les deux sièges sur les 214 que compte désormais le Parlement, on peut soutenir que le choix de la participation militante a été politiquement payant.

Il a été le bon. Car, durant ces quelques jours où nous avons pu aller au contact direct de la population et diffuser notre vision et notre programme, nous avons réussi à faire entendre notre voix. En particulier, après l’intervention télévisée de notre candidat aux présidentielles qui a eu un impact réel sur les Tunisiens et qui a été jugée sérieuse, crédible, courageuse, voire audacieuse.

Les listes de la Moubadara ont pu se distinguer. Elles ont réussi à introduire un peu de clarté dans le «flou artistique» qu’on veut imposer à nos concitoyens. Elles ont clairement indiqué la ligne de partage entre l’opposition sérieuse et l’opposition de connivence dont les membres, en bonne logique, préfèrent, en ce qui les concerne, se donner le nom de «partenaires» à la place de celui d’ «opposants»… Un vocable sans doute trop lourd à porter et, en fin de compte, inapproprié.

Dans l’unanimisme ambiant de nos médias et, en faisant abstraction des programmes électoraux centrés presque exclusivement sur les problèmes du … Moyen-Orient, les Tunisiens ont su reconnaître le discours neuf qui a abordé, de manière franche et directe, leurs principales préoccupations et inquiétudes. Un discours sérieux et responsable qui a visé juste non seulement parce qu’il a abordé les vrais problèmes du pays, mais aussi parce qu’il a parlé de valeurs, d’honnêteté et de rectitude, à une société dont les repères sont en train d’être chamboulés. Cette voix a porté. Elle a été entendue. Elle incarne, aujourd’hui, un espoir. C’est une énorme responsabilité que de ne pas décevoir !

En pleine campagne électorale, plusieurs d’entre nous répétaient, à juste titre, que le vrai travail allait commencer le 26 octobre. Avec cette nouvelle donne, cette proposition n’en est que plus vraie. Il est urgent de capitaliser cette avancée. A nous de cultiver l’espoir qui a été semé, tout en travaillant sans relâche à l’union de tous les démocrates et progressistes du pays. Cette union, dont nous avons perçu certaines prémisses durant la campagne, est nécessaire au tournant démocratique tant convoité. Le travail qui nous attend est énorme… Alors, au boulot !

Baccar Gherib

L’Initiative nationale pour la Démocratie et le Progrès: Déclaration sur les élections

Notre pays a vécu, ces derniers jours, une phase importante de sa vie politique : l’élection du Président de la République et des membres de la Chambre des députés.
L’Initiative nationale pour la Démocratie et le Progrès (INDP) a estimé que ces élections constituaient une occasion exceptionnelle - dont le pays est privé en temps ordinaire - pour faire entendre au peuple tunisien une voix autre que la voix dominante qui tente de faire croire qu’elle constitue la voix unique, que tout est pour le mieux dans le meilleur des mondes et qu’il n’ y a aucune alternative au parti au pouvoir et à son personnel politique.
L’INDP a rencontré lors de ces élections des obstacles innombrables : de la loi électorale (à laquelle s’étaient opposés les députés d’Ettajdid) à l’invalidation de nombreuses listes, la saisie du journal « Attariq Al Jadid », l’interdiction des manifestes électoraux et des affiches pendant plusieurs jours, la gestion partisane des espaces publics de réunion, la censure de nombreux passages dans les interventions à la télévision et à la radio de plusieurs têtes de liste de l’INDP et, pour terminer, les nombreux abus et irrégularités qui se sont produits le jour du scrutin (et dont nous avons fait état, en temps utile, à l’Observatoire national des élections).
Malgré toutes ces difficultés, l’INDP a réussi à mettre en évidence le fait - que certains ont voulu nier - qu’elle représente effectivement un mouvement d’opposition sérieux et responsable, qui propose des idées et des perspectives alternatives distinctes des idées dominantes, fondées sur une analyse sérieuse, immédiatement applicables, ou, pour le moins, pouvant constituer une base solide pour un débat national global sur les orientations générales de notre pays. Elle a aussi montré que cette alternative est portée par des hommes et des femmes patriotes, compétents, qui ne sont mus ni par l’intérêt matériel ni par l’attrait du pouvoir, ne comptant que sur les forces propres de leur peuple, et dont le seul souci est de mettre leurs capacités, leur expérience et leurs compétences au service de leur pays et du progrès de leur peuple.
Ces élections auraient pu constituer une occasion pour faire évoluer la situation vers un système politique répondant aux besoins de notre peuple et aux aspirations de sa jeunesse, afin d’engager une réforme qui consacre le droit du citoyen à choisir ses dirigeants en toute liberté et concrétise la richesse du paysage politique de notre pays en énergies nombreuses et diverses, disposées à servir leur patrie.
L’obstination à maintenir la mainmise du parti au pouvoir sur tous les aspects de la vie politique et sociale a fait rater à notre pays cette occasion de réformer le système politique, ce qui traduit l’intention chez certains de faire de la prochaine étape de la vie politique du pays une réédition de l’expérience précédente, peut-être même avec plus de fermeture. Ainsi, les résultats officiels des élections ne reflètent ni le rapport réel des forces politiques dans la société, ni l’étendue de la large sympathie rencontrée, auprès des larges couches de la population, par l’INDP et ses candidats aux présidentielles et aux législatives.
Ces résultats viennent plutôt consacrer l’hégémonie du parti au pouvoir et des partis qui lui sont proches, dans une tentative pour décourager et marginaliser l’opposition nationale et démocratique responsable.
L’INDP est convaincue que l’avenir de la Tunisie, sa stabilité et son invulnérabilité passent par une politique fondée sur la justice sociale et une réforme globale du système politique qui consacre les principes du régime républicain et les valeurs de citoyenneté, d’égalité et de souveraineté du peuple, exercée à travers des élections libres et transparentes, qui contribue à promouvoir la vie politique et garantisse aux partis à caractère civil souhaitant agir dans la légalité - en particulier le Parti du Travail patriotique et démocratique - le droit à la reconnaissance légale.
L’INDP est décidée à consolider, au cours de la prochaine étape, l’alliance entre ses composantes, sur la base de la plateforme présentée à l’opinion publique à l’occasion de l’annonce de la candidature de M. Ahmed Brahim, sur laquelle elle a pris appui tout au long de la campagne électorale.
L’INDP est d’autre part résolue à approfondir les convergences qui se sont réalisées au cours de la campagne électorale, pour franchir de nouvelles avancées en rassemblant le maximum d’énergies en vue de créer un mouvement démocratique et progressiste puissant et agissant, capable d’influer sur le cours des événements et d’assurer à notre pays et à ses enfants un avenir meilleur.
A cette occasion, l’INDP dans toutes ses composantes : militants indépendants, Mouvement Ettajdid et Parti du Travail patriotique et démocratique, exprime sa vive reconnaissance à toutes les citoyennes et à tous les citoyens qui ont donné leur voix à son candidat à la présidence de la République et à ses candidats aux législatives.
Elle exprime aussi sa reconnaissance au peuple tunisien qui a accueilli ses meetings dans toutes les régions du pays, a assisté à ses réunions et a manifesté de l’intérêt pour ses idées et ses propositions, en surmontant indifférence et pressions.
Elle exprime de même sa considération et ses félicitations chaleureuses à ses militants, ses amis et sympathisants pour la combativité, la fermeté et l’enthousiasme dont ils ont fait preuve au cours de la campagne électorale. Leur comportement responsable leur a permis de surmonter les obstacles et de faire face aux pressions, aussi bien celles qui poussent à rester chez soi en se contentant de protestations verbales, que celles qui poussent à accepter le fait accompli et à se résigner devant la politique du bâton et de la carotte.
Elle prend acte du fait que le Mouvement Ettajdid n’a pas été écarté de la Chambre des Députés, où ses deux représentants auront la responsabilité d’exprimer fortement les positions de l’opposition sérieuse.
L’INDP exprime sa considération pour tous ceux qui ont soutenu son candidat Ahmed Brahim, en particulier le « Forum démocratique pour le Travail et les Libertés » (FDTL) et les listes « Réforme et Développement ». Elle renouvelle l’expression de sa solidarité avec le FDTL, victime d’exclusive lors de ces élections.
A toutes les personnalités, en Tunisie et dans l’émigration, à tous les intellectuels, artistes, écrivains, médecins, avocats, universitaires, aux syndicalistes et militants des droits humains qui ont apporté leur soutien à l’INDP et ses candidats, l’INDP adresse un grand merci !

Tunis, le 27 octobre 2009

vendredi 9 octobre 2009

Khemaies Chammari : « J’appelle à soutenir la candidature d’Ahmed Brahim ».

Un entretien avec Khémaïes CHAMMARI ancien secrétaire général de la LTDH (1982-1992) et ancien député MDS (1994-1996).

Attariq Aljadid : A quelques jours de la campagne électorale 2009, comment évaluez-vous la situation politique actuelle et quelle attitude avez-vous décidé d’adopter pour ces deux scrutins présidentiel et législatif ?

Kh. Ch. : Je voudrais, de prime abord, dire que je soutiens, de façon tout à fait claire, la candidature de mon ami Ahmed Brahim à l’élection présidentielle du 25 octobre 2009. Dès l’annonce de la campagne au printemps 2008 en faveur de la candidature de Nejib Chebbi, fondateur du PDP, j’avais estimé qu’il était indispensable de soutenir de façon active tous les candidats de l’opposition véritable – non ceux de l’opposition de «connivence» qui se présentent face au Président Ben Ali tout en estimant qu’il faut voter pour lui!! Tous les candidats, donc, qui désirent participer à cette bataille politique, certes faussée, mais dont l’enjeu est de contribuer à élargir le combat contre le système et la culture du parti unique ainsi que contre toute forme de pensée unique. Les candidatures de Nejib Chebbi et celle de Mustapha Ben Jaafar s’inscrivaient dans ce cadre et l’une et l’autre ont été écartées par les dispositions, à mes yeux anticonstitutionnelles, de la loi «exceptionnelle» conçue sur mesure et amendant, en avril 2008, une nouvelle fois, «à titre provisoire» la constitution, officiellement pour élargir le champ des candidatures, mais en réalité pour éliminer tel ou tel prétendant dont l’envergure pourrait poser problème aux tenants de «l’Etat-Destour».

Restait le candidat d’Ettajdid et de l’Initiative démocratique et progressiste. Premier secrétaire de son parti, élu par un congrès deux avant le dépôt de sa candidature, Ahmed Brahim pouvait difficilement être mis à l’écart à l’instar des deux autres candidats de l’opposition démocratique exclus de ce scrutin.

Et d’entrée de jeu, Ahmed Brahim a dit nettement, de façon ferme et sobre, qu’il n’était pas un candidat de figuration, et qu’il comptait «mener cette compétition d’égal à égal» - ce qui a suscité les réactions d’intolérance et les tracasseries que vous avez fort justement dénoncées. C’est pourquoi j’ai décidé de lui apporter, à la veille de la campagne officielle, mon modeste soutien.

A. A.: Vous marquez ainsi vos distances par rapport aux tenants de l’abstention et du boycottage du scrutin ?

Kh. CH. : Entendons-nous bien. J’estime que dans le contexte du processus de «plébicisation» qui nous est une fois de plus imposé, les scrutins de 2009 constituent une nouvelle occasion manquée. La façon dont l’administration et le Conseil constitutionnel ont « fait le ménage » au niveau des listes de l’opposition démocratique aux législatives, dont les vôtres, les rites d’allégeance auxquels nous assistons depuis près de deux ans, le monopole du RCD sur les médias et le verrouillage institutionnel auquel nous sommes confrontés, font que je refuse toute controverse et toute polémique avec les partisans du boycott dont je comprends l’argumentaire sur ce qui risque d’être qu’un simulacre électoral et dont je saisis tout à fait la portée du choix qu’ils proposent. Mais au terme, de l’itinéraire politique qui est le mien, je ne me résouds pas, face aux défis actuels, à appeler au boycottage. C’est une bataille politique qu’il faut mener pour montrer que si l’alternative ne peut être immédiate, elle n’est en tout cas pas aberrante et qu’il existe d’autres hommes et femmes patriotes et démocrates capables d’aspirer aux plus hautes charges de l’Etat. Des hommes et des femmes qui dénoncent le «tout répressif», l’instrumentalisation de la justice et des médias, la corruption galopante, les mauvaises réponses apportées aux revendications sociales légitimes, notamment celles des habitants du bassin minier Redeyef - Gafsa. Des hommes et des femmes attachés à l’Etat de droit qui réclament la cessation de l’arbitraire policier, du recours à la torture et la promulgation d’une amnistie générale incluant le retour des exilés politiques. Des hommes et des femmes qui, après les dizaines d’amendements apportés à la Constitution, souhaitent une refonte démocratique de celle-ci qui suppose, entre autres exigences, une réforme en profondeur du code électoral, la séparation des dates de l’élection présidentielle et des élections législatives, comme le rappelait pertinemment cette semaine M. Hamadi Redissi, politologue reconnu, ainsi que la remise en cause des dispositions de la réforme constitutionnelle imposée par referendum en 2002 qui a ouvert à nouveau la voie à la présidence à vie. C’est entre autres ce que j’ai rappelé dans un entretien paru le 1er octobre dans le quotidien Le Monde, saisi en Tunisie.

A. A. : Votre appel à soutenir la candidature de Ahmed Brahim ne concerne donc que le scrutin présidentiel ?

Kh. CH. : Bien évidemment. Et je suis, comme je viens de vous le dire, pour une séparation des deux échéances, présidentielle et législatives. Pour ces dernières, je pense que les dés sont malheureusement totalement pipés et pervertis par le code électoral actuel qui, non seulement rend vaine toute observation sérieuse des élections compte tenu du nombre excessif des bureaux de vote et du refus du pouvoir d’accepter de véritables observateurs nationaux et internationaux, mais aussi parce qu’il bloque toute perspective de front électoral large entre les partis et les indépendants et qu’il se double d’une loi sur le financement public des élections et des partis dont la finalité est honorable mais dont les modalités sont délibérément perverses. Mais pour l’essentiel ma sympathie pour nombre des candidats des « bleus » est évidente.

A. A. : Alors quelles perspectives envisagez-vous au lendemain de cette échéance ?

Kh. Ch. : Lors d’une réunion à Paris, il y a un mois, j’ai mis l’accent sur l’importance du « day after », le 26 octobre. Il faudra, au lendemain de ce scrutin sans surprises et de cette bataille politique utile mais dont les ambigüités et les insuffisances sont évidentes, réfléchir aux conditions et aux modalités d’une refondation politique au niveau des oppositions véritables que le pouvoir veut à tout prix marginaliser en faisant la part belle aux oppositions du décor faussement pluraliste. Cela suppose au moins deux grands chantiers :

-Le premier concerne la conjugaison des efforts et des luttes pour consolider notre soutien aux instances légitimes de l’association des magistrats, du syndicat des journalistes et de la LTDH tout en renforçant l’action unitaire en faveur des populations du Bassin minier (enclavé, éprouvé socialement et politiquement, et victime de l’incurie administrative lors des récentes inondations), des syndicalistes et des militants réprimés, dont mon ami Moheddine Cherbib, président de la FTCR « jugé » par contumace à deux ans de prison ferme..

- Le second chantier concerne les débats idéologiques et politiques de l’opposition démocratique, enfermée dans des clivages personnels (ce que j’appelle le tout à l’ego) et politiques, y compris la question de l’attitude à l’égard des divers courants islamistes. J’appelle au pragmatisme, au dialogue loyal et ouvert, en dépassant les faux débats. Et je le fais en affirmant clairement que je n’ai de ce point de vue aucune ambition personnelle autre que celle de contribuer à une Tunisie meilleure qui prenne réellement en charge la détresse et l’indifférence à l’égard de la chose publique et de la politique de la majorité de la population, et en particulier d’une jeunesse frappée de plein fouet par un chômage galopant et une absence de perspective d’un changement véritable. Il nous faut faire preuve, au-delà des constats de blocage et de la colère légitime suscitée par les manies répressives du pouvoir, les calomnies et la haine des thuriféraires et des plumitifs zélés ; il nous faut être optimiste. Et de ce point de vue, je veux dire merci à l’Ambassadeur Ahmed Ounaïes, pour son vibrant appel dans la dernière livraison de Mouwatinoun sous le titre «Gardez l’espoir» qu’il aborde en ces termes : «Le jour n’est pas loin où nous aurons des élections tunisiennes libres et démocratiques. La Tunisie est mûre pour cette transition. Nous partageons avec les sociétés évoluées les valeurs de justice, de progrès et de liberté». Inchallah !

vendredi 2 octobre 2009

L’invalidation massive des listes électorales : sa signification politique

Au terme de l’opération de dépôt et de validation des candidats aux élections législatives, le bilan est le suivant : sur les 26 listes présentées par Ettajdid/Initiative Nationale Démocratique et Progressiste, 13 ont été refusées et 13 ont été validées. Sans la résistance aux pressions exercées sur de nombreux candidates et candidats, l’hécatombe aurait été bien pire. Plus grave encore, Ettajdid/Initiative est mis hors course dans les gouvernorats où il existe encore une certaine vie politique : Tunis (1 et 2), Sfax (1 et 2), Gafsa, Kairouan, Monastir et Bizerte, en particulier.

Toutes les listes invalidées ont déposé des recours auprès du Conseil Constitutionnel dont la réponse est attendue pour les deux prochains jours.

Le décor est ainsi planté, non seulement pour circonscrire la campagne législative d’Ettajdid/Initiative, mais aussi la base militante de soutien à Ahmed Brahim, seul candidat d’opposition à la présidence de la République.

Plus fondamentalement, tout se passe comme si on avait programmé le nettoyage de la Chambre des Députés par la mise à l’écart d’Ettajdid, dernier et seul parti de l’opposition représenté au Parlement. Cette mise à l’écart ne se limite pas à la Chambre des Députés ; elle concerne tous les autres espaces où il a droit de cité du fait de sa qualité de parti parlementaire : les commissions supérieures consultatives et le Conseil Economique et Social.

Dans tous ces lieux, ce sera le bon retour à l’unanimisme. Car les autres partis légaux de l’opposition –PDP et Forum- semblent être voués au même sort : moins d’une dizaine de listes leur ont été validées. Ce qui semble programmé, c’est la réduction des trois partis à une vie végétative.

Ce qui se joue ces jours-ci, c’est la Tunisie des cinq prochaines années et c’est 2014. Le rêve que semble caresser et mettre en œuvre avec détermination le pouvoir (ou certains de ses cercles) pour les cinq prochaines années et au-delà, c’est celui d’une scène politique totalement « pacifiée », aseptisée, soumise. L’histoire du monde moderne nous enseigne, pourtant, que la nature a horreur du vide et que la disparition des acteurs civil(isé)s est forcément comblée par des acteurs… moins regardants.

Ce qui est en jeu durant ces jours cruciaux pour l’histoire de notre pays, ce n’est pas seulement Ettajdid et ses partenaires, ce ne sont pas seulement les partis d’opposition démocratique, ce n’est pas seulement la société civile ; ce sont, on le craint, les institutions républicaines mêmes, voire l’avenir de la Tunisie.

Le Conseil Constitutionnel a un rôle fondamental : il peut encore faire acte d’indépendance et donner une suite favorable aux recours présentés par les listes injustement disqualifiées.

La question n’est plus aujourd’hui de savoir si on doit participer ou non aux élections. Il s’agit d’être tous en éveil, d’empêcher que le pays ne soit entraîné dans une dérive commençant par Ettajdid/Initiative et les partis d’opposition, s’étendant ensuite à ce qui reste de la société civile et à tous les espaces de liberté. Nous sommes tous concernés.

Mahmoud Ben Romdhane