La taxe Tobin vous vous en rappelez? Il s'agit de cette fameuse proposition faite en 1972 par le futur prix Nobel James Tobin pour taxer les transactions monétaires et financières internationales afin de faire face à la spéculation. Il avait suggéré à l'époque d'appliquer une taxe faible qui pouvait varier de 0,05% à 1%. Tobin s'est opposé à sa proposition quelques années plus tard et a déclaré dans une interview au quotidien français Le Monde le 8 septembre 2001 "j'apprécie l'intérêt qu'on porte à mon idée, mais beaucoup de ces éloges ne viennent pas d'où il faut. Je suis économiste et, comme la plupart des économistes, je défends le libre-échange. De plus, je soutiens le Fonds Monétaire International, la Banque Mondiale et l'Organisation Mondiale du Commerce, tout ce à quoi ces mouvements s'en prennent. On détourne mon nom".
Dans cette déclaration, James Tobin désignait les mouvements altermondialistes qui se sont appropriés cette idée pour en faire leur cheval de bataille dans la lutte contre la globalisation et la montée de la finance internationale. Cette idée a fait du chemin et n'est pas restée cantonnée dans le champ de la contestation seulement. En effet, les crises financières à répétition dans les années 90 ont amené beaucoup de gouvernements à l'envisager. Ainsi, le projet d'une taxe a-t-il été envisagé et discuté au sein des Nations Unies, et même lors du G7 à Halifax en 1995. Le gouvernement du premier ministre français Lionel Jospin l'avait même envisagé et le parlement avait voté en 2001 une taxe sur les transactions financières. Mais, en dépit des débats et des discussions, cette taxe n'a pas connu le moindre début d'application dans aucun pays du monde!
Or, la crise financière globale que connaît le capitalisme a été à l'origine d'une évolution importante du débat sur les choix économiques. La responsabilité de la libéralisation financière et des choix des politiques économiques des années 80 et 90 marquées par le néo-libéralisme reaganien et thatchérien a été admise très vite. Du coup, un important champ de débat et de réflexion a été ouvert et une remise en cause radicale s'est emparée du champ économique et politique. Tous les interdits et les tabous du passé ont été remis en cause. L’Etat n'est plus cet ennemi honni des politiques économiques et le marché est tombé de son piédestal et n'est plus considéré comme la panacée des économies modernes. La libéralisation a perdu de son attrait et la régulation est plutôt à l'ordre du jour!
Mais, en dépit de cette effervescence intellectuelle et de la remise en cause du libéralisme radical des années 80 ou bon teint des années 90, la taxe Tobin n'est pas revenue dans le débat. Cet effacement s'explique par le fait que les propositions de reconstruction et de refondation de l'ordre international vont au-delà de cette idée réformiste. Même les débats au sein du G 20 et dans la plupart des pays développés envisagent des propositions beaucoup plus radicales et sont en train de voir la mise en place de règles beaucoup plus dures afin de faire face à cette économie d'endettement et de risque qui a failli emporter le système global.
Or, depuis quelques jours, la taxe Tobin refait surface et notamment lors d'un débat en France sur les questions des financements innovants du développement organisé par le Ministère des affaires étrangères le 29 mai 2009. Lors de l'ouverture de cette réunion, Bernard Kouchner, le Ministre français des affaires étrangères, a affirmé "qu'il faut aujourd'hui tirer le meilleur bénéfice de l'interdépendance financière des marchés internationaux en prélevant une fraction des transactions financières quotidiennes sur une base volontaire, parce que le financement du développement doit devenir un impératif moral". Ainsi, ce retour de la question de la taxe Tobin n'a plus pour objectif de mettre des grains de sable dans le fonctionnement des marchés financiers internationaux et d'empêcher la spéculation, mais cherche désormais à faire face aux besoins de financement du développement et à l'impératif de trouver des ressources supplémentaires pour faire aux difficultés budgétaires des pays développés. Alain Joyandet, le secrétaire d'Etat à la coopération, a indiqué de son côté que "la crise financière menace les flux de capitaux dans les pays en développement et oblige donc à trouver des voies innovantes pour récupérer des fonds". Pour les deux ministres français, une taxe de 0,005% appliquée sur une base volontaire pourrait rapporter une somme entre 30 et 60 milliards de $ par an qui serait dédiée au financement du développement.
Il faut dire que nous disposons d'une expérience intéressante qui concerne la taxe lancée par l'ancien président français Jacques Chirac d'un prélèvement de 1 à 40 euros sur les billets d'avion pour les consacrer au financement de l'achat de médicaments pour les pays du Tiers-Monde. Cette taxe a rapporté en 2008 près de 300 millions de $ qui ont été versés à Unitaid, une agence internationale spécialisée dans l'achat de médicaments permettant de lutter contre le sida, le paludisme et la tuberculose. Ces versements ont permis à 100 000 enfants atteints du sida de recevoir des traitements. Par ailleurs, cette proposition reçoit un appui de plus en plus important et treize pays l'on déjà mise en place et une quinzaine d'autres pays pensent rejoindre cette initiative rapidement.
Ainsi, la crise pose avec une plus grande acuité, la question du financement du développement. De ce point de vue, la taxe Tobin pourrait constituer une voie importante pour répondre aux besoins de financement des pays en développement et de relance en ces temps de crise même si certains s'y opposent comme la Ministre française des Finances.
Slim Ben Taleb
Or, la crise financière globale que connaît le capitalisme a été à l'origine d'une évolution importante du débat sur les choix économiques. La responsabilité de la libéralisation financière et des choix des politiques économiques des années 80 et 90 marquées par le néo-libéralisme reaganien et thatchérien a été admise très vite. Du coup, un important champ de débat et de réflexion a été ouvert et une remise en cause radicale s'est emparée du champ économique et politique. Tous les interdits et les tabous du passé ont été remis en cause. L’Etat n'est plus cet ennemi honni des politiques économiques et le marché est tombé de son piédestal et n'est plus considéré comme la panacée des économies modernes. La libéralisation a perdu de son attrait et la régulation est plutôt à l'ordre du jour!
Mais, en dépit de cette effervescence intellectuelle et de la remise en cause du libéralisme radical des années 80 ou bon teint des années 90, la taxe Tobin n'est pas revenue dans le débat. Cet effacement s'explique par le fait que les propositions de reconstruction et de refondation de l'ordre international vont au-delà de cette idée réformiste. Même les débats au sein du G 20 et dans la plupart des pays développés envisagent des propositions beaucoup plus radicales et sont en train de voir la mise en place de règles beaucoup plus dures afin de faire face à cette économie d'endettement et de risque qui a failli emporter le système global.
Or, depuis quelques jours, la taxe Tobin refait surface et notamment lors d'un débat en France sur les questions des financements innovants du développement organisé par le Ministère des affaires étrangères le 29 mai 2009. Lors de l'ouverture de cette réunion, Bernard Kouchner, le Ministre français des affaires étrangères, a affirmé "qu'il faut aujourd'hui tirer le meilleur bénéfice de l'interdépendance financière des marchés internationaux en prélevant une fraction des transactions financières quotidiennes sur une base volontaire, parce que le financement du développement doit devenir un impératif moral". Ainsi, ce retour de la question de la taxe Tobin n'a plus pour objectif de mettre des grains de sable dans le fonctionnement des marchés financiers internationaux et d'empêcher la spéculation, mais cherche désormais à faire face aux besoins de financement du développement et à l'impératif de trouver des ressources supplémentaires pour faire aux difficultés budgétaires des pays développés. Alain Joyandet, le secrétaire d'Etat à la coopération, a indiqué de son côté que "la crise financière menace les flux de capitaux dans les pays en développement et oblige donc à trouver des voies innovantes pour récupérer des fonds". Pour les deux ministres français, une taxe de 0,005% appliquée sur une base volontaire pourrait rapporter une somme entre 30 et 60 milliards de $ par an qui serait dédiée au financement du développement.
Il faut dire que nous disposons d'une expérience intéressante qui concerne la taxe lancée par l'ancien président français Jacques Chirac d'un prélèvement de 1 à 40 euros sur les billets d'avion pour les consacrer au financement de l'achat de médicaments pour les pays du Tiers-Monde. Cette taxe a rapporté en 2008 près de 300 millions de $ qui ont été versés à Unitaid, une agence internationale spécialisée dans l'achat de médicaments permettant de lutter contre le sida, le paludisme et la tuberculose. Ces versements ont permis à 100 000 enfants atteints du sida de recevoir des traitements. Par ailleurs, cette proposition reçoit un appui de plus en plus important et treize pays l'on déjà mise en place et une quinzaine d'autres pays pensent rejoindre cette initiative rapidement.
Ainsi, la crise pose avec une plus grande acuité, la question du financement du développement. De ce point de vue, la taxe Tobin pourrait constituer une voie importante pour répondre aux besoins de financement des pays en développement et de relance en ces temps de crise même si certains s'y opposent comme la Ministre française des Finances.
Slim Ben Taleb
Aucun commentaire:
Enregistrer un commentaire