L’agriculture contribue à 12% du Produit Intérieur Brut, voire plus si l’on comptabilise la part de l’agro-alimentaire. Elle occupe encore près du quart de la population active. Malgré cela et d’énormes progrès techniques réalisés, elle souffre d’un déficit d’image, et plus encore d’un «déficit de représentation», hérités de l’histoire récente et d’une certaine conception des priorités économiques, mais aussi de la désaffection à peine dissimulée des élites dirigeantes depuis l’Indépendance. En effet, c’est le secteur où la profession, pourtant nombreuse (prés de 500.000 agriculteurs au dernier recensement), est la moins bien représentée auprès des pouvoirs publics et peine souvent à s’affirmer à travers un syndicat agricole, pourtant ancien.
Le dernier congrès de l’Union tunisienne de l’agriculture et de la pêche (UTAP), qui s’est tenu du 16 au 18 avril dernier,, était un rendez-vous important. D’abord parce qu’il se tient une fois tous les cinq ans et ensuite parce que c’est une occasion importante pour les agriculteurs et les pêcheurs de se retrouver, de débattre de leurs préoccupations, de renouveler leurs instances et de se faire entendre des pouvoirs publics et de l’opinion.
Au-delà de l’événement et de la couverture médiatique de circonstance, que peut-on retenir d’un rendez-vous longtemps attendu ?
Une adaptation qui tarde à venir
Cet événement était d’autant plus attendu qu’il se tenait à un moment où notre agriculture doit faire face à une double échéance : celle de l’ouverture à l’extérieur dans le cadre de l’accord d’association avec l’Union européenne et des accords de l’OMC, et celle de la libéralisation des marchés et du désengagement de l’Etat des activités de collecte et de commercialisation des principaux produits agricoles (céréales, huile d’olive, lait..).
Il était donc attendu, à l’occasion de ce rendez-vous quinquennal, que l’organisation professionnelle censée représenter le monde agricole dans sa diversité et sa richesse, s’appropriât les problématiques majeures qui conditionnent largement son devenir: vieillissement de la population agricole, problèmes fonciers, recul des investissements, obsolescence des structures de développement…: les sujets ne manquaient et ne manquent toujours pas!
Mais il eut fallu pour cela que l’UTAP fasse son aggiornamento, qu’elle renouvelle ses structures et revoie le mode de désignation et d’élection de ses dirigeants, qui reste d’un autre âge. Car il est aujourd’hui impensable pour un adhérent d’espérer se faire élire s’il n’est pas préalablement désigné par ceux-là qu’il risque de concurrencer aux élections du Conseil Central. Quant à atteindre le Bureau exécutif, il faut être tout simplement adoubé ! Or, il faudra bien se résoudre à revoir ce fonctionnement si l’on veut retrouver une représentativité qui s’est effritée et une crédibilité bien entamée auprès des professionnels. Sinon comment espérer porter la voix des quelques 500.000 agriculteurs et peser sur l’échiquier national, si ce n’est en comptant sur une reconnaissance bienveillante des pouvoirs publics? Or, si cette reconnaissance est nécessaire, elle ne doit pas être une sorte d’indulgence accordée ou d’un compromis précaire qui fragilise l’autonomie de ce qui est avant tout un syndicat agricole de dimension nationale.
Et l’on est en droit de s’interroger sur les conditions de cette autonomie lorsqu’on observe le financement de la centrale agricole. Car on est frappé par l’importance de la subvention reçue de l’Etat, qui représente, à elle seule, près de 60% du total de ses recettes annuelles. Peut-être est-ce là une juste récompense? Mais à s’y laisser prendre, on y perd sans doute beaucoup d’autonomie et de liberté de manoeuvre!
N’y a-t-il pas moyen d’obtenir, non seulement une plus grande contribution des adhérents à travers les cotisations, mais aussi à travers les diverses taxes parafiscales prélevées sur les produits agricoles? C’est, nous semble-t-il, une voie plus satisfaisante, qui renforcerait l’autonomie de l’organisation professionnelle tout en garantissant la transparence de sa gestion.
Des défis qui restent à relever
Mais on attendait aussi que, sur le fond, ce congrès fût à la hauteur des enjeux de l’étape à venir en même temps que des attentes de sa base réelle, en exprimant des propositions fortes.
Sur quelques thèmes majeurs, on aurait voulu entendre plus, et notamment sur :
L. B. B.
Le dernier congrès de l’Union tunisienne de l’agriculture et de la pêche (UTAP), qui s’est tenu du 16 au 18 avril dernier,, était un rendez-vous important. D’abord parce qu’il se tient une fois tous les cinq ans et ensuite parce que c’est une occasion importante pour les agriculteurs et les pêcheurs de se retrouver, de débattre de leurs préoccupations, de renouveler leurs instances et de se faire entendre des pouvoirs publics et de l’opinion.
Au-delà de l’événement et de la couverture médiatique de circonstance, que peut-on retenir d’un rendez-vous longtemps attendu ?
Une adaptation qui tarde à venir
Cet événement était d’autant plus attendu qu’il se tenait à un moment où notre agriculture doit faire face à une double échéance : celle de l’ouverture à l’extérieur dans le cadre de l’accord d’association avec l’Union européenne et des accords de l’OMC, et celle de la libéralisation des marchés et du désengagement de l’Etat des activités de collecte et de commercialisation des principaux produits agricoles (céréales, huile d’olive, lait..).
Il était donc attendu, à l’occasion de ce rendez-vous quinquennal, que l’organisation professionnelle censée représenter le monde agricole dans sa diversité et sa richesse, s’appropriât les problématiques majeures qui conditionnent largement son devenir: vieillissement de la population agricole, problèmes fonciers, recul des investissements, obsolescence des structures de développement…: les sujets ne manquaient et ne manquent toujours pas!
Mais il eut fallu pour cela que l’UTAP fasse son aggiornamento, qu’elle renouvelle ses structures et revoie le mode de désignation et d’élection de ses dirigeants, qui reste d’un autre âge. Car il est aujourd’hui impensable pour un adhérent d’espérer se faire élire s’il n’est pas préalablement désigné par ceux-là qu’il risque de concurrencer aux élections du Conseil Central. Quant à atteindre le Bureau exécutif, il faut être tout simplement adoubé ! Or, il faudra bien se résoudre à revoir ce fonctionnement si l’on veut retrouver une représentativité qui s’est effritée et une crédibilité bien entamée auprès des professionnels. Sinon comment espérer porter la voix des quelques 500.000 agriculteurs et peser sur l’échiquier national, si ce n’est en comptant sur une reconnaissance bienveillante des pouvoirs publics? Or, si cette reconnaissance est nécessaire, elle ne doit pas être une sorte d’indulgence accordée ou d’un compromis précaire qui fragilise l’autonomie de ce qui est avant tout un syndicat agricole de dimension nationale.
Et l’on est en droit de s’interroger sur les conditions de cette autonomie lorsqu’on observe le financement de la centrale agricole. Car on est frappé par l’importance de la subvention reçue de l’Etat, qui représente, à elle seule, près de 60% du total de ses recettes annuelles. Peut-être est-ce là une juste récompense? Mais à s’y laisser prendre, on y perd sans doute beaucoup d’autonomie et de liberté de manoeuvre!
N’y a-t-il pas moyen d’obtenir, non seulement une plus grande contribution des adhérents à travers les cotisations, mais aussi à travers les diverses taxes parafiscales prélevées sur les produits agricoles? C’est, nous semble-t-il, une voie plus satisfaisante, qui renforcerait l’autonomie de l’organisation professionnelle tout en garantissant la transparence de sa gestion.
Des défis qui restent à relever
Mais on attendait aussi que, sur le fond, ce congrès fût à la hauteur des enjeux de l’étape à venir en même temps que des attentes de sa base réelle, en exprimant des propositions fortes.
Sur quelques thèmes majeurs, on aurait voulu entendre plus, et notamment sur :
- La situation économique et financière des agriculteurs - toutes catégories confondues - de plus en plus fragilisée par le double effet de la libéralisation ou plutôt la déréglementation des marchés des principales productions agricoles, à l’exception des céréales (mais pour combien de temps encore ?) et de l’explosion des coûts de production, mais aussi par le poids insupportable des taux d’intérêts bancaires et l’inadaptation de la politique de crédit à l’agriculture. Est-il normal en effet que seuls 7% des agriculteurs accèdent encore aux concours bancaires?
- La nécessité qu’il y a d’une organisation des filières de production et des marchés, afin de garantir les intérêts des producteurs, de sécuriser les approvisionnements et d’assurer la traçabilité des produits. Ceci sans parler de la nécessité qu’il y a de prévoir des mécanismes de régulation et de soutien publiques. Car la dernière crise alimentaire de 2008 nous a montré combien il peut être risqué de mettre l’agriculture d’un pays entre les seules mains du commerce mondial et son auto-régulation supposée.
- La mise en place d’un Programme National de Mise à Niveau de l’agriculture, qui doit être réclamée d’urgence, avec des moyens conséquents et des objectifs à respecter tant par l’Administration que par les bénéficiaires. Faute de quoi, l’ouverture prochaine de nos frontières aux produits agricoles européens et aux autres sera dévastatrice pour nos agriculteurs autant que pour notre économie.
L. B. B.
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