samedi 23 mai 2009

A travers la blogosphère #8 : révolution culturelle et sociologie du débat en Tunisie

La blogosphère s'agite souvent mais réfléchit aussi. Enjeux : notre révolution culturelle et un essai d'une sociologie du débat en Tunisie.

"2,83 millions d'utilisateurs de l'Internet en Tunisie, 8,59 millions d'abonnés à la téléphonie mobile, 6758 sites tunisiens…" Selon les chiffres officiels, notre pays est confortablement installé dans l'ère de la révolution numérique, constate le blog Histoires ordinaires. Mais a-t-il fait pour autant sa révolution culturelle ? s'interroge-t-il. Par analogie, le blog rappelle que l'avènement de l'imprimerie en Europe au XVème siècle a été le prélude à "une renaissance culturelle globale" en Europe. En démocratisant l'accès à l'écrit, favorisant l'essor de la philosophie et des lettres et la diffusion de la connaissance et la formation de la pensée critique, cette invention a remis en cause le dogme de l'Eglise et son monopole sur les consciences et a conduit à une "grande révolution culturelle en Europe et dans le monde" qui a "détruit tous les rêves de domination de l'Eglise dans la société". "Qu'en est-il de notre société ?", s'interroge le blog. "Quelle est l'influence sur la société de 'notre" révolution numérique ?" poursuit-il ? "Est-elle en train de favoriser la créativité dans les arts et la littérature ? De développer les capacités intellectuelles et critiques de créateur ? De contrecarrer l'invasion culturelle des ténèbres et de la culture de la peur, de la censure et de la répression ?" Cette "révolution" a-t-elle permis "l'amélioration du niveau moral et culturel de la société et le nivellement par le haut des médias et le respect de la liberté d'expression ?" Que d'interrogations accompagnées, avoue le blog, de "beaucoup de frustrations et de pessimisme…"


En détournant l'intitulé de la célèbre émission de télé-réalité, Andi Ma Nkollek, diffusée sur notre télévision publique, Errances pose la problématique du débat dans la société tunisienne. Le blog note que le tunisien exprime au quotidien un réel besoin de débat. Sa "soif (…) pour parler, s’exprimer, écouter, convaincre" est clairement palpable. Ses intentions en la matière sont "noble(s) et louable(s)". Mais le tunisien est-il "vraiment prêt pour débattre" ?, se demande le blog. Le débat consacre la "différence" et la "divergence d'opinions" et "abhorre l'unanimité (et) la concordance", rappelle-t-il. L'unanimisme de "départ vide donc débat de tout "sens" prévient-il. La société tunisienne est marquée par la pluralité des idées, à l'instar des "autres sociétés qu’elles soient occidentales ou orientales", constate le blog. Et l'éventail des opinions et des tendances dans notre société est large, précise-t-il, qui est composé "de gauchistes, de fondamentalistes, de rcdistes, d’anarchistes, de progressistes, de jusqu’au-boutistes, de khobsistes, de mauvistes, de hitistes, de clubistes, d’espérantistes, …", "voire même d’autistes", ironise-t-il. Mais le tunisien possède sa propre conception du débat, estime le blog, qui s'apparente plutôt au "contentieux (ou au) conflit". Le tunisien "confond tribune et tribunal" et "la présence d'un arbitre" est nécessaire pour que le "débat tunisien" ait lieu. En somme, la culture du débat fait défaut au tunisien qui prend "sa vérité pour 'LA vérité'" et enfonce ainsi le débat dans l'impasse d'"un dialogue de sourds". Cet "ostracisme", que relève le blog, condamne les tunisiens à "se cloitrer dans un ghetto" où "l’on ne se mélange qu’avec ses semblables idéologiques" mais "est-ce que c’est comme ça qu’on va pouvoir avancer ?" se demande le blog. Et au blog de conclure au nécessaire "apprentissage" du débat chez les tunisiens. Mais les idées ne suffisent par, rappelle-t-il, le "courage" et la "capacité d'écouter" sont aussi nécessaires pour sortir de l'auberge.


Hédi Ben Smail


PS : les illustrations ont été empruntées respectivement aux blogs Histoires ordinaires et Errances.

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